Dans le cadre du Labex Les Passés dans le présent, le projet 2ARC, porté par des membres de l'équipe d'Ethnologie préhistorique (coord. Goutas, Bodu & Mevel - UMR 7041), a pour objectif la préservation, la mise en valeur de l'Histoire, du Patrimoine et de la mémoire des documents concernant les fouilles réalisées depuis le 19ème siècle dans différentes cavités du massif d'Arcy-sur-Cure, et en particulier celles d' André Leroi-Gourhan (1946-1963).

Les fouilles d'André Leroi-Gourhan à la grotte du Renne : étude de cas de la couche V gravettienne

Au chantier-école de fouilles d’Arcy-sur-Cure (Yonne) 1946-1963 : un cas d’étude sur la professionnalisation de l’archéologie préhistorique

Étude historique développée dans le cadre du projet 2ARC (de février à juin 2017), par Alfonso RAMÍREZ GALICIA, Enseignant à l’École Nationale d’Anthropologie et d’Histoire, Mexico, Mexique.

La tradition centenaire des recherches préhistoriques d’Arcy-sur-Cure nous a laissé des traces précieuses de son existence dans ses archives ; notamment pour l’une des périodes les plus riches et importantes de son histoire : celle du chantier-école de fouilles d’André Leroi-Gourhan de 1946 à 1964. Ces archives sont constituées, spécialement, par des documents inédits de la vie quotidienne au chantier de fouille. i.e. carnets de fouille, esquisses de plans et de coupes stratigraphiques, des photos et des films.

Dans le cadre du projet « Archives de fouilles Arcy-sur-Cure » nous avons lancé un programme de recherche historique qui a deux objectifs fondamentaux. 1. La systématisation des données anciennes dans un format adapté à leur exploitation scientifique contemporaine. 2. La construction d’images ethnographiques des pratiques scientifiques passées – fondées sur la reconstitution détaillée de la vie sur le chantier – pour contribuer à une étude comparative du processus de professionnalisation de l’archéologie préhistorique, pendant les années 1940-1960.

Deux sont les résultats concrets de ce projet. Premièrement, la production d’une série de plans qui représentent les étapes de réalisation de la première campagne de fouilles à la grotte du Renne (1949). Ces plans ont permis, notamment, de reconstituer une « surface d’habitat » possible dans une zone et un niveau de la grotte (i.e. « niveau V ») restés problématiques jusqu’à nos jours – en raison de l’histoire complexe des recherches et par l’absence d’une publication définitive à l’époque de Leroi-Gourhan.

Deuxièmement, la mise au jour d’éléments sur la nature des processus d’innovation méthodologique, dans la reconstitution détaillée – voire, « ethnographique » – de cette première campagne à la grotte du Renne.

Les travaux ont commencé comme un sondage stratigraphique « classique » ; cependant, la rencontre fortuite d’éventuelles « structures de combustion » ont permis de s’occuper – de façon pratique – de la spatialité de la vie quotidienne du passé. Il s’agissait d’une poursuite de l’ambition (paléo-) ethnologique, impulsée par Leroi-Gourhan : en s’adressant au problème de prouver l’existence de structurations synchroniques à l’intérieur des couches stratigraphiques, le chantier est devenu un laboratoire d’expérimentation de nouvelles méthodes de fouille et d’enregistrement visuel de cette dimension spatiale-humaine des gisements préhistoriques.

Sujet de recherche : Histoire intellectuelle des méthodes et des pratiques scientifiques  de la préhistoire, XIXème et XXème siècles

Les préhistoriens ne disposent que des fragments et des vestiges pour essayer de reconstituer la vie des femmes et des hommes du passé. Alors, le défi n’est seulement pas de disposer de méthodes appropriées pour interpréter ces vestiges. Les méthodes – et la science en générale – sont affaire des femmes et des hommes et, par conséquent, ont aussi leur histoire.

Faire de l’histoire des sciences est, alors, une condition nécessaire pour faire de la préhistoire. En ce sens, nous approchons l’histoire de la préhistoire en « palethnologues » : intéressés dans une reconstitution détaillée de la vie quotidienne sur le chantier des fouilles ; à partir d’études de cas susceptibles de charpenter une vision comparative – plus critique et plus humaine –des trajectoires des outillages et des pratiques scientifiques, dont nous disposons aujourd’hui pour affronter le défi des vestiges du passé.

 

Tenango del Aire, Mexique, 9 octobre 2017

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